Mes vies paralleles

Julien Leschiera

Le Dilettante

  • Conseillé par (Libraire)
    10 février 2023

    Le gynéco l'avait dit sans ambage à la parturiente : Le foetus est avachi, votre fils est une grosse fainéasse. Dès la funeste annonce, branlebas de combat chez les Dubois. Un enfant dont le père est militaire et la mère et la soeur hyperactives, ne peut être un flemmard. Hélas, le père qui en a maté des plus mous meurt d'un accident de friteuse avant la naissance et la mère et la soeur ne pourront que constater leur échec dans leur combat contre ce vice odieux. Car même si Charles, molasson, timide et frèle, souvent bouc émissaire, donne parfois le change pour avoir la paix, il pratiquera toujours, de sa prime enfance à sa vie d'adulte, la stratégie de l'évitement, qu'il soit confronté aux petits ou aux grands obstacles. A l'instar de Bartleby le scribe, Charles "préférerait ne pas". Charles, lointain cousin d'Ignatus, le personnage principal de "La conjuration des imbéciles", préfère s'oublier dans la rêverie, dans ses nombreuses vies parallèles où il est un autre, plus fort, plus beau, plus intéressant. Ces vies parallèles, 500 pages d'humour ravageur, d'un regard acéré sur le monde, presque une fable. Car finalement, cet antihéros attachant, n'a-t-il pas raison de paresser ? Car paresser ce n'est pas ne rien faire, paresser c'est ralentir, paresser, c'est résister, au bruit, à la fureur, à la course effrénée. Article publié dans le Bruit qui court