Faut-il faire taire Tariq Ramadan ?
EAN13
9782841876471
ISBN
978-2-84187-647-1
Éditeur
Archipel
Date de publication
Collection
POLITIQUE, IDEE
Nombre de pages
260
Dimensions
22,5 x 14 cm
Poids
467 g
Langue
français
Code dewey
297.09
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Faut-il faire taire Tariq Ramadan ?

De

Archipel

Politique, Idee

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DU MÊME AUTEUR

Le Bagagiste de Roissy, présumé coupable, avec Abderrezak Besseghir, Michel Lafon, 2003.

Paroles de banlieue, avec Jean-Michel Decugis, Plon, 1995.

Un livre présenté par Joseph Vebret.

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eISBN 978-2-8098-1323-4

Copyright © L'Archipel, 2005.

« Mais je sais qu'aujourd'hui certains cherchent en tâtonnant et ne savent plus à qui se fier ; à ceux-là je viens dire : croyez ceux qui cherchent la vérité, doutez de ceux qui la trouvent ; doutez de tout, mais ne doutez pas de vous-même. »

André GIDE, Ainsi soit-il
ou Les jeux sont faits, 1952

Avant-propos

Barcelone, juillet 2004. Tariq Ramadan et trois autres personnalités s'expriment au sein du Parlement des religions. L'amphithéâtre, tout ouïe, écoute quatre intellectuels s'entretenir des défis de l'islam contemporain. La salle interroge le quatuor de penseurs. Les questions s'adressent avant tout à l'islamologue suisse. Les autres doivent s'emparer du micro pour faire entendre leur voix. À la fin du débat, une dizaine de personnes entourent Tariq Ramadan, des jeunes, des vieux, surtout des non-musulmans.

— Je vous ai envoyé mon dernier ouvrage, l'avez-vous reçu ? demande un auteur du Danemark.

— Je suis désolé, je ne lis pas le danois...

Tariq Ramadan suscite l'intérêt partout où il passe. Et pas seulement chez les musulmans. Au point que l'hebdomadaire américain Time l'a classé en 2004 parmi les cent personnalités les plus influentes de ce début de XXIe siècle. À peine une dizaine d'entre elles sont européennes comme lui.

Qui est donc Tariq Ramadan, né à Genève en 1962, marié à une institutrice franco-suisse, père de quatre enfants et qui, malgré un agenda surchargé, se réserve quelques matinées par semaine pour enseigner le Coran à ses héritiers ? Est-ce un intégriste qui force sa fille aînée à porter le hijab1à l'aube de ses dix-sept ans ? Ou un « modéré » qui s'accommoderait qu'elle ne le porte pas ?

En France, la curiosité autour de son personnage est d'abord née dans un petit cercle, à la suite de la controverse suscitée par un texte critiquant ceux qu'il a qualifiés de « (nouveaux) intellectuels communautaires2 ». Stigmatisant le rapport particulier que certains penseurs médiatiques entretiennent, selon lui, avec Israël, Tariq Ramadan a prêté le flanc à l'accusation d'antisémitisme. Dans la foulée, invité par France 2 à débattre avec Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, il s'est attiré de rudes critiques en ne paraissant pas dénoncer clairement la pratique de la lapidation encore en vigueur dans certains pays qui se réclament de l'islam3. Il a néanmoins appelé à un « moratoire », sous le regard médusé de Cécilia Sarkozy. Au lendemain de cette prestation, Tariq Ramadan, aux yeux de nombreux observateurs, revêtait le costume de porte-parole de l'« Axe du mal ».

Cependant, il sillonne la France depuis une quinzaine d'années, de colloques officiels en prestations à destination des musulmans de l'Hexagone. À l'époque, le discours dominant de victimisation endossé dans les médias par SOS Racisme – qui depuis a « glissé » vers la « barbarisation », sans analyse de ses errements passés – empêchait d'entendre toute pensée alternative. Tariq Ramadan prêchait, lui, contre la victimisation et pour la responsabilité des individus, dans le bonheur comme dans le malheur.

Afin que le lecteur puisse disposer de tous les éléments pour se faire sa propre opinion, et dans l'espoir de lever toutes les ambiguïtés, chacun des thèmes abordés dans la première partie a fait l'objet de questions directes posées à Tariq Ramadan. Y compris celles qui fâchent. Ses réponses et ses réactions aux témoignages que je cite constituent la deuxième partie de ce livre (l'entretien).

1. Voile couvrant les cheveux et le cou de la femme musulmane en présence d'étrangers (catégorie de personnes n'ayant pas le droit de regarder le corps de la femme).

2. Voir annexes, p. 323.

3. Voir l'intégralité de cet échange en annexe, p. 345.

1

FAUT-IL FAIRE TAIRE TARIQ RAMADAN ?

UN HELVÈTE CHEZ LES GAULOIS

Sakina Bakha, ex-conseillère régionale Vert de la région lyonnaise, a de la suite dans les idées. Partout où Tariq Ramadan intervient, elle lui pose inlassablement les mêmes questions. Âgée de quarante-six ans, cette militante a participé à tous les mouvements politiques et sociaux depuis vingt ans dans l'agglomération lyonnaise, de la mobilisation pour l'égalité des droits, plus connue sous le nom de « Marche des Beurs », jusqu'aux manifestations contre les licenciements. Elle est partout, Sakina. Et vigilante...

Lyon et ses environs sont en quelque sorte la capitale idéologique de Tariq Ramadan. Depuis une dizaine d'années, l'intellectuel suisse fréquente la région. La proximité avec sa patrie de naissance et l'accueil chaleureux des jeunes musulmans de la capitale des Gaules ont favorisé son intégration dans le débat français.

C'est au début des années 80 que l'on observe une agitation d'idées en agglomération lyonnaise. L'échec de la Marche des Beurs pour l'égalité des droits a poussé nombre de militants à envisager d'autres voies. Comment conquérir cette égalité sans renier son identité ? Après tout, il existe bien des catholiques de gauche ou des démocrates-chrétiens : la religion n'a pas constitué un obstacle à leur participation à la vie sociale et politique. En d'autres termes, comment être considéré comme tout à fait français aux yeux des pouvoirs publics et de ses élites, sans raser les murs ? En cette fin de XXe siècle, les musulmans français sont-ils condamnés à revivre l'assimilation forcée et jacobine, avec son lot d'humiliation des minorités régionales, telle qu'elle se pratiquait à la fin du XIXe siècle ?

C'est dans ce bouillonnement et sur les cendres des échecs des mobilisations strictement laïques que l'Union des jeunes musulmans (UJM), créée en 1987, sollicite Tariq Ramadan au début des années 90. Ce sera son premier ancrage en France. « Nous étions à la fois dans une démarche citoyenne et spirituelle, se souvient Abdelaziz Chanbi, un des fondateurs de l'UJM. On refusait l'assimilation et le statut de Français de deuxième zone. On a connu Tariq Ramadan à un congrès de l'UJM ; il nous semblait proche de nos problématiques : harmoniser nos valeurs musulmanes et l'engagement politique. À l'époque, j'admirais Dom Helder Camara1, chrétien, résistant à son institution catholique au nom de ses propres valeurs. Tariq Ramadan l'avait rencontré dans des luttes communes dans le tiers-monde. »

L'UJM creuse son sillon. « La théologie de la libération s'engageait à libérer les pauvres, pas à leur imposer un modèle de société, chrétienne en l'occurrence », constate le père Christian Delorme, plus connu sous le sobriquet de « curé des Minguettes2 ». « L'UJM n'est pas monolithique. Je l'ai connue à ses débuts, en 1987. Il y avait à sa tête quelqu'un qui était plus dans le spirituel que dans la politique. Tariq Ramadan les a conduits à se replier sur leur identité musulmane pour faire de la politique. Là où l'UJM est influente, comme à Vénissieux et à Saint-Fons, le repli communautaire est le plus marqué. À l'inverse, à Vaulx-en-Velin, l'UJM a moins d'influence et la cité est plurielle. On oppose souvent Hani Ramadan à son frère Tariq, mais l'UJM semble à l'aise avec les deux. »

L'UJM, avec Tariq Ramadan, veut devenir le chantre de l'islamo-progressisme. Son modèle : les Jeunesses ouvrières chrétiennes3 plutôt que la CFTC4 d'aujourd'hui. Les luttes contre les inégalités sociales et pour une autre mondialisation sont désormais une des revendications des Lyonnais : « Nous ne voulons pas faire partie d'une minorité musulmane au sein de la majorité citoyenne. Nous sommes des citoyens comme les autres, porteurs aussi de valeurs universelles. »

Qui est alors Tariq Ramadan ? Né en Suisse en 1962, cet enseignant, doyen d'un lycée genevois, est parti au début des années 90 en Égypte. Occidental, il expérime...
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